De manière concrète, la vulgarisation des outils Gérez mieux votre entreprise (GERME) et Réarmement moral, civique et entrepreneuriale (REAMORCE) vise à contribuer à la réintégration durable de chaque migrant dans le tissu socioprofessionnel de sa communauté. « L’OIM a réussi à ramener avec le concours du Minrex tous ces migrants en difficulté. Dans le cadre de la reprise de confiance en eux et de la possibilité d’une réintégration dans la société et d’une préparation plus fiable avant d’aller en exil, le ministère de la Jeunesse intervient donc avec le REAMORCE. Le pays est encore disposé à les accompagner, ils peuvent encore s’installer sur place et mieux vivre et s’ils veulent repartir, ils peuvent le faire par les voies les plus légales », a indiqué le délégué régional de la Jeunesse et de l’Education civique pour le Littoral, Jacques Terrestra Nang.
Des formations orientées vers l’auto-emploi
Les sessions de formation portent sur les modules suivants : l’étude de marché, l’étude financière, les risques encourus en entreprise et comment les éviter pour ne pas arriver à un échec, les techniques pour bénéficier d’un appui financier au Fonds national de l’emploi, les sources de financement, etc. « Le Fonds national de l’emploi est là pour accompagner ces jeunes migrants en leur donnant les outils techniques pour pouvoir développer ou créer leur projet. L’Oim met à leur disposition, pour tous ceux qui reviennent, 750 000F qui peuvent servir d’apport personnel pour rechercher d’autres financements afin de développer leur projet. Donc ils peuvent éventuellement bénéficier d’un appui du FNE s’ils nous soumettent leur projet », soutient le délégué régional du FNE-Littoral, Pierre Tekapsso.
Les migrants apprécient à leur juste mesure les modules de formation. Retourné du Maroc le 20 avril 2023, Salomon Eyango Dimithe caresse le rêve de devenir chef d’une entreprise opérant dans la peinture et le revêtement. « Je ne connaissais rien en peinture et c’est durant cette aventure que je l’ai appris à travers les Marocains et les Espagnols. Je suis venu apprendre des techniques qui peuvent améliorer mes connaissances, comment faire pour ouvrir cette entreprise, la gérer de façon durable, la rendre pérenne, comment éviter de faire faillite et que je puisse recruter d’autres Camerounais », a confié le jeune homme âgé de 31 ans actuellement sans activité. Revenue au pays depuis près de six mois, après une expérience manquée en Mauritanie, Thérèse Djituk (30 ans) quant à elle, veut opérer dans le commerce des vivres frais au marché PK 14 à Douala. « Je veux approfondir mes connaissances et voir comment développer mon business », souhaite celle qui est par ailleurs mère de deux enfants.
La dimension psycho-sociale n’est pas négligée. « Notre part dans le cadre de la réinsertion socio-économique des migrants à Douala est de voir comment on reconnecte le migrant qui était parti avec son environnement, la société, sa famille et la communauté. C’est de lui redonner la confiance qu’il a perdue à cause de l’échec subi avec son voyage raté. C’est de restaurer sa personnalité et sa dignité d’homme pour qu’il retrouve toutes les aptitudes et les capacités à même de lui permettre de recommencer, mais davantage de lui dire que tout n’est pas fait de l’autre côté », a précisé le délégué régional des Affaires sociales pour le Littoral, Zacharie Mboma. Et d’ajouter : « Localement, il y a des opportunités. Il faut simplement s’investir et avec le concours de l’Etat comme c’est actuellement le cas avec le Fonds national de l’emploi et l’OIM qui apporte des financements pour leur formation à l’entrepreneuriat. Ils doivent comprendre que partir n’est pas toujours la solution ».
Une équipe de suivi-évaluation en gestation
Après le travail de base effectué par l’OIM dans la présélection des bénéficiaires de cette formation, le FNE va leur donner des conseils et réaliser une cartographie des secteurs dans lesquels ils veulent investir. « Le FNE va assurer le suivi pour ceux qui vont s’installer à leur propre compte, notamment ceux qui auront bénéficié d’un appui financier également du FNE. Avec cette formation, nous donnons un appui technique. Avec l’OIM, on va mettre sur pied une équipe de suivi-évaluation », argumente M. Tekapsso. En perspective, le FNE mise sur la pérennité des entreprises qui seront créées. « Le principal facteur de succès de cette vague sera la mesure. Ce sera déjà le nombre d’entreprises créées par ces jeunes migrants et au bout de deux ans, voir les entreprises qui auront le mieux résisté. La moitié des entreprises meurent au bout de deux ans, donc celles qui iront au-delà de deux ans seront l’indicateur pour voir si notre travail a bien marché », ajoute notre interlocuteur. Après la formation, les migrants seront intégrés dans la base de données du FNE. L’opération se déroule simultanément à Yaoundé et concerne 150 autres migrants.
Selon les informations fournies par l’OIM, les premiers mouvements de retour de ressortissants camerounais remontent au début des années 2000. Ces retours, provenant essentiellement des pays d’Europe, concernaient un nombre limité de migrants. Entre juin 2017 et juillet 2022, l’Initiative conjointe de l’Union européenne et de l’OIM pour la protection et la réintégration des migrants a favorisé le retour de plus de 6000 migrants et la réintégration dans le tissu socio-économique du Cameroun de près de 5000 d’entre eux.